RDC| Le ministre Mutamba s’égare dans ses arguments juridiques face au procureur Mvonde

Dans une lettre au procureur général près la Cour de cassation, le ministre de la Justice commet des erreurs manifestes sur les règles de récusation, selon une analyse juridique approfondie.

Le ministre d’État, ministre de la Justice et garde des sceaux, Constant Mutamba, inculpé dans une affaire de détournement présumé de 19 millions de dollars destinés à la construction d’une prison à Kisangani, a rompu le silence pour récuser le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde.

Cependant, une analyse juridique rigoureuse révèle des erreurs manifestes dans son raisonnement, remettant en cause la validité de ses arguments.

Une interprétation restrictive et erronée de la loi

Le ministre Mutamba affirme que seule la récusation du magistrat instructeur serait recevable, excluant ainsi la possibilité de viser le procureur général. Pourtant, l’article 59 de la Loi organique concernée stipule clairement que la récusation s’applique à tout juge ou officier du ministère public, sans distinction de rang ou de fonction. « Le texte est sans équivoque : le Procureur Général près la Cour de cassation peut être récusé s’il existe une cause légitime », explique un juriste spécialisé en procédure pénale.

Une méconnaissance des circuits procéduraux

Le ministre soutient également que la requête de récusation doit être adressée au supérieur hiérarchique du magistrat concerné. Or, cette affirmation témoigne d’une confusion procédurale grave. « Lorsqu’il s’agit d’un haut magistrat comme le procureur général près la Cour de cassation, qui ne relève d’aucune autorité hiérarchique directe, la requête doit être portée devant la juridiction compétente ou transmise au Conseil Supérieur de la Magistrature », précise une source judiciaire, affirmant que le droit à la récusation, garanti par les principes fondamentaux du procès équitable, prime sur toute considération administrative.

Une confusion sur l’indivisibilité du ministère public

Enfin, le ministre Mutamba invoque le principe d’indivisibilité du ministère public (article 50 de la même loi) pour affirmer qu’aucune récusation ne serait possible en l’absence d’un parquet de substitution. Cette interprétation est juridiquement infondée. « L’indivisibilité signifie que les magistrats du parquet agissent au nom d’une autorité unique, mais cela n’empêche pas la récusation d’un magistrat pour partialité », a ajouté le juriste spécialisé en procédure pénale.

La balle est désormais dans le camp des institutions judiciaires, qui devront trancher sur la recevabilité de cette récusation – et, surtout, sur le fond de l’affaire. Une chose est sûre : les arguments du ministre de la Justice, criblés d’approximations, ne semblent pas tenir devant l’examen rigoureux du droit.

Par Dieumerci Anawezi

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