Port de Banana en RDC : DP World confie un contrat de 250 millions $ à Mota-Engil pour un projet stratégique

Le projet phare du port en eau profonde de Banana, en République démocratique du Congo (RDC), franchit une étape décisive avec l’attribution d’un contrat de 250 millions de dollars à l’entreprise portugaise Mota-Engil. Annoncé discrètement par DP World, l’opérateur portuaire émirati en charge du projet, ce partenariat marque un pas concret vers la réalisation d’une infrastructure censée redéfinir la connectivité maritime et économique du Congo.

Dans un communiqué daté du 20 mars 2025, DP World a confirmé avoir sélectionné Mota-Engil Africa, filiale du géant portugais du BTP, pour développer la première phase du port de Banana. D’après des informations relayées par Reuters et confirmées par Mota-Engil SGPS SA, le contrat s’élève à 230 millions d’euros (environ 250 millions de dollars). Il couvre la construction d’un quai de 600 mètres avec un tirant d’eau de 18 mètres, capable d’accueillir les plus grands navires porte-conteneurs au monde. Cette phase inclut également une zone de stockage de 30 hectares et des équipements de pointe pour traiter jusqu’à 450 000 EVP (équivalents vingt pieds) par an.

Si le montant actuel semble inférieur aux estimations initiales (350 millions de dollars pour cette phase), c’est en partie grâce aux travaux préliminaires déjà réalisés. Comme le rappelle Expobéton dans une récente newsletter, la digue de protection du site, destinée à lutter contre l’érosion et les marées, était achevée à 88 % en juin 2023.

Lancé en 2018 via un accord entre DP World et l’État congolais, le projet de Banana a connu des tensions en 2024, entraînant une interruption des travaux. Des « différends techniques et financiers » entre les parties avaient alors freiné l’avancée du chantier. Une réunion de crise présidée en septembre 2024 par le vice-Premier ministre Jean-Pierre Bemba avait permis de débloquer la situation, sans toutefois lever toutes les incertitudes sur les délais. Initialement prévue pour 2025, la livraison de la première phase reste en suspens, aucun calendrier révisé n’ayant été communiqué.

Le partenariat public-privé, révisé en décembre 2021, accorde à DP World une concession de 30 ans (extensible à 50 ans) pour construire et exploiter le port. La répartition du capital de la coentreprise est claire : 70 % pour l’émirati, 30 % pour la RDC. DP World assume l’essentiel du financement et de l’expertise technique, tandis que l’État congolais fournit le site, des exonérations fiscales et des infrastructures de soutien, comme la route Banana–Matadi.

Pour la RDC, ce port en eau profonde représente une opportunité historique de s’affranchir de sa dépendance vis-à-vis des ports étrangers, notamment celui de Pointe-Noire (Congo-Brazzaville) et du port fluvial de Matadi, dont les capacités limitées entravent le commerce international. Banana, situé à l’embouchure du fleuve Congo, offrira un accès direct à l’océan Atlantique, intégrant le pays aux grandes routes maritimes mondiales.

Malgré l’enthousiasme affiché, des questions persistent. Le corridor de Lobito, soutenu par Trafigura et Mota-Engil, pourrait en effet capter une partie des flux miniers congolais, au détriment de Banana. Par ailleurs, les retards accumulés et les litiges passés soulignent la complexité d’un projet nécessitant une coordination étroite entre acteurs publics et privés.

Reste que Banana incarne l’ambition congolaise de contrôler ses propres infrastructures stratégiques. Une fois opérationnel, il devrait réduire les coûts logistiques, dynamiser les exportations de minerais et diversifier l’économie nationale. Pour les populations locales, il promet aussi des emplois et un développement urbain accru.

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