La rivière Ndjili, en crue depuis samedi soir, a provoqué des inondations dévastatrices dans plusieurs communes de la circonscription de Tshangu, plongeant Kinshasa dans une crise humanitaire et révélant l’ampleur des dysfonctionnements urbains accumulés depuis des décennies. Des quartiers entiers de Ndjili, Masina, Debonhomme, ainsi qu’une partie du boulevard Lumumba et de Limete (Camp Riche), sont submergés, tandis que près de 14 communes de la capitale congolaise sont privées d’eau et d’électricité.
Les autorités locales évoquent un nombre « important » de morts, principalement par noyade, mais aucun chiffre officiel n’a pu être confirmé en raison de l’inaccessibilité des zones sinistrées. Le boulevard Lumumba, artère vitale de Kinshasa, est coupé sur une grande partie de son tronçon, et l’aéroport international de Ndjili reste inaccessible depuis le centre-ville. Des milliers de sinistrés, ayant souvent construit illégalement sur des emprises publiques ou dans des zones inondables, sont piégés par les eaux.
« Les équipes de secours ne peuvent pas intervenir efficacement avant la décrue », déplore un responsable de la sécurité civile, soulignant le manque criant de matériel et de formation.
Une cellule de crise, activée par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka depuis sa participation au AIM Congress 2025 à Abu Dhabi, coordonne les interventions avec plusieurs ministères (Intérieur, Affaires sociales, Défense) et institutions comme la REGIDESO, la SNEL, ou le Génie militaire. Cependant, sur le terrain, les obstacles sont multiples : « La sécurité civile n’a pas accès aux zones les plus critiques. Les habitants sont livrés à eux-mêmes», témoigne un bourgmestre de Masina.
Malgré des alertes météo et des plans locaux élaborés une semaine plus tôt pour Kisenso et Ndjili, rien n’a pu contrer le désastre. « Il y a eu un laisser-aller institutionnel. La ville de Kinshasa n’est pas comptable des actes qu’elle n’a pas posés», dénonce un citoyen, pointant la crise de gouvernance entre la municipalité et le gouvernement central sur la gestion des terres. La Ville, dépendante du ministère de l’Intérieur pour les secours, manque de moyens et d’autonomie.
Mais pour les habitants, la colère monte : « On savait que ces quartiers étaient à risque. Pourquoi n’a-t-on rien fait avant ?», interroge une résidente de Debonhomme.
La catastrophe relance le débat sur l’urgence de réformes structurelles : drainage des eaux, relogement des populations vulnérables, et surtout, application stricte des règles d’urbanisme. En attendant, Kinshasa retient son souffle, espérant une décrue rapide et des secours à la hauteur de l’urgence.
Rédaction : Horus-Gabriel Buzitu