Lors d’une intervention marquante devant le Conseil de sécurité des Nations unies ce mercredi 19 février 2025, la ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba, a lancé un cri d’alarme sur la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Elle a exigé la « révocation immédiate » du statut du Rwanda en tant que fournisseur de contingents pour les missions de l’ONU, dénonçant un pays qui « assèche les bases de la MONUSCO, cible les avions de la mission, lance des attaques meurtrières contre les casques bleus » et utilise même le rapatriement des corps de soldats de la paix comme monnaie d’échange lors des négociations.
« Le Rwanda a foulé aux pieds les principes du maintien de la paix. Cette contradiction sape la crédibilité même des Nations unies », a-t-elle martelé, exigeant un vote public pour une résolution condamnant l’occupation rwandaise et réclamant le retrait de ses troupes
La ministre a révélé des chiffres glaçants : en 48 heures seulement, plus de 4 000 personnes ont été massacrées à Goma par le M23, soutenu par Kigali. Parmi les victimes figurent des civils exécutés sommairement, dont le chef coutumier de Kiziba, tué avec sa famille le 11 février, et l’artiste Delca Idengo, assassiné le 13 février pour « imposer le silence ». Ces atrocités s’inscrivent dans une stratégie de terreur visant à étouffer toute résistance et à contrôler les zones minières riches en coltan. Ces massacres s’ajoutent à une crise humanitaire catastrophique : 7 millions de déplacés dans l’est du pays, des hôpitaux bombardés, et des routes coupées bloquant l’aide humanitaire.
La demande de Kinshasa s’appuie sur des preuves accablantes :
- Attaques contre la MONUSCO : Les troupes rwandaises et le M23 ciblent systématiquement les Casques bleus, comme en témoigne la mort de 14 soldats sud-africains en deux semaines ;
- Pillage économique : Plus de 150 tonnes de coltan et de l’or ainsi que d’utres minerais sont exportées illégalement chaque mois depuis la RDC via le Rwanda, finançant directement le conflit.
- Administration parallèle : Le M23, soutenu par Kigali, a établi un contrôle territorial et administratif illégal, restreignant l’accès de la MONUSCO à Goma et à son aéroport.
Face à ces accusations, le Royaume-Uni a annoncé qu’il « envisage activement les prochaines mesures à prendre avec les partenaires internationaux », incluant une révision de son soutien au Rwanda. Cette prise de position rejoint celles de la France et des États-Unis, qui condamnent les interférences rwandaises.
Kinshasa réclame des sanctions ciblées contre les responsables militaires et politiques rwandais, un embargo sur les minerais pillés, et un mécanisme de traçabilité pour les transferts d’armes vers Kigali. La ministre Kayikwamba a également dénoncé l’« inaction » du Conseil, soulignant que trois réunions d’urgence en un mois n’ont abouti à aucune résolution concrète, malgré les condamnations verbales. Seuls les pays du groupe A3 (Algérie, Somalie, Sierra Leone) refusent de condamner le Rwanda, invoquant des « solutions africaines ». Un positionnement critiqué par Kinshasa, qui y voit une complaisance envers l’agresseur.
Les avertissements se multiplient : l’ONU redoute un « embrasement régional », alors que le M23, appuyé par des milliers de soldats rwandais, contrôle désormais Bukavu et avance vers des zones stratégiques.
Le processus de Luanda, soutenu par l’Union africaine, reste au point mort, miné par la méfiance entre Kinshasa et Kigali.
Rédaction : Horus-Gabriel Buzitu